Quand le service public se comporte comme le privé

Publié le 2 juillet 2010
Rédigé par 
kriescherph

décalage

Philippe KRIESHER

Rue Lucien Defays 85, 1er étage

4800 Verviers Le 30 juin 2010

V.O.O. TECTEO

Monsieur le Président du comité exécutif

rue Jean Jaurès, 46

4430 ANS

Monsieur le Président,

Je suis assistant social dans un petit CPAS semi urbain et conseiller CPAS dans une grande ville.

Bien que ne m’occupant professionnellement que de revenus d’intégration sociale et de réinsertion socioprofessionnelle, je suis au courant de toutes les problématiques de mes collègues, ne fût-ce que quand je les remplace en permanence.

Comme mon organisation syndicale et comme mon parti politique, je défends avec acharnement les services publics et l’idée même de service public, non pas d’un point de vue purement idéologique parce que mon enfance aurait été bercée par Marx, par Trotsky ou Bakounine, mais bien par toutes les observations faites au quotidien tant professionnel que privé.

Lorsque j’ai eu la chance pendant cinq ans et demi d’être membre d’un exécutif d’une grande intercommunale liégeoise, je l’ai vécu comme un mandat politique correspondant parfaitement à mon projet de société.

Par mon travail social (mon boulot diraient certains), je suis en contact permanent avec la souffrance humaine, conséquence de trente ans d’idéologie ultralibérale. De par les bénéficiaires du CPAS, nous connaissons bien toutes les méthodes de marketing du privé qui permettent de vendre à une personne défavorisée un produit dont elle n’a absolument pas besoin. Et ces dernières années, nous atteignons le paroxysme de ce système ultralibéral, notamment avec la marchandisation du gaz et de l’électricité.

Bien que n’ayant pas en charge le secteur énergétique dans mon CPAS, je pourrais écrire un livre sur les méthodes de vente du secteur, sur leurs méthodes antisociales et sur leurs absurdités bureaucratiques, pourtant dénoncées à l’époque du service public. J’ai coutume de dire que si vous déménagez, vous vous exposez à avoir des immenses problèmes bureaucratiques avec … le secteur privé du gaz et de l’électricité …

Avec ça, j’ai de la matière pour dénoncer tous les maux liés à la privatisation des services publics, source d’une logique contraire aux intérêts du consommateur et des travailleurs, contrairement à ce que veut bien faire l’idéologie dominante.

Mais … quand un service public agit comme une entreprise privée, je suis chaque fois désarçonné dans ma défense du service public. D’accord, c’est mieux car les bénéfices ne servent pas à rémunérer des actionnaires privés, mais bien le secteur public, donc la collectivité.

Mais … quand on vient me trouver à ma permanence sociale … parce que via une domiciliation bancaire, votre service public TECTEO, retire d’un coup plus de 600 EUR à une personne qui touche un revenu d’intégration sociale, et pour l’unique raison d’un retard de facturation dudit service public, je suis scandalisé. Ce sont des méthodes du privé.

Retirer plus de 600 EUR d’un coup au bourgmestre de Verviers, à un échevin de Liège, à un cadre supérieur, à un professeur d’université ou à un cardiologue, c’est pas très grave.

Retirer plus de 600 EUR à un RIS, à un chômeur, à une famille à revenu unique d’employé, voire à deux petits revenus, c’est énorme. Pour un RIS ou un chômeur, c’est le début du bain de sang social que souhaiterait nous imposer notre futur premier ministre.

Lorsque je défends avec acharnement le service public, c’est un service public au service du public avec un esprit de service public, pas avec un esprit et des méthodes libérales.

Salut et fraternité.

Philippe Kriescher.