Monsieur le Président, Chères et chers Collègues,

Vous me permettrez d’être bref sur le budget lui-même.

Vous le savez, c’est la 1ère fois que je suis amené à l’analyser, et c’est un exercice périlleux à réaliser en une semaine !

Soyez assurés que je vais m’entraîner toute l’année pour être parfaitement opérationnel dans un an !

Et les quelques questions que je me posais ont trouvé réponse, au moins partiellement, dans les exposés qui précèdent.

Je ne manquerai pas revenir à l’occasion sur l’un ou l’autre point.

Par contre, je me suis plus attardé à votre « Note de politique générale ».On ne peut pas dire qu’elle soit très enthousiasmante, cette note de politique générale ! Il y est plus question de restrictions, de contrôles, de moyens limités, d’attestations à fournir, … que d’accueil, d’aide, ou de soutien.

J’épinglerai juste trois domaines, qui me semblent emblématiques de la ‘politique sociale’ que vous entendez mener.

– l’intégration : en gros, pour vous, l’intégration passe essentiellement par la maîtrise du français, et pour cela, vous proposez deux pistes, dans cet ordre : 1) obtenir une attestation d’inscription et de fréquentation des cours de français, et 2) un budget additionnel de 40.000 euros. Avec deux mesures d’une telle ampleur, c’est certain qu’on ne parlera plus que le français dans quelques mois, à Verviers.

Soyons sérieux, tout de même : l’intégration est un défi majeur pour les années à venir. Il ne s’agit pas que de savoir parler français. Le CPAS a un rôle de premier plan à jouer dans ce processus. Or les deux mesures que vous proposez sont évidemment totalement insignifiantes par rapport à l’ampleur de ce défi !

– le logement : on le sait, c’est le dada de notre président. Et bien entendu, je suis heureux de lire que l’objectif, c’est d’assurer un logement décent pour tous. Par contre, je suis atterré de lire que la seule mesure concrète proposée pour atteindre cet objectif, c’est, je cite : « le non octroi de la caution locative pour tout logement suivi par la Commission santé-sécurité- de la Ville, ou frappé d’un arrêté d’inhabitabilité ».

Je doute fortement que refuser une caution locative pour un logement insalubre soit une mesure suffisante pour garantir un logement décent à tous !

Il faudrait, mais ça, vous le savez bien, une politique ambitieuse de logement sociaux. Seule cette offre suffisante de logements de qualité à prix abordable pourrait mettre en échec les visées mercantiles de propriétaires peu scrupuleux…

Mais je crains fort que le peu d’ambition de la majorité dans ce domaine ne cache en réalité un objectif beaucoup moins avouable : il s’agit surtout de décourager une certaine population de s’installer à Verviers ou d’y rester. Au large les miteux et les galeux ! Créons un petit Knokke sur Vesdre où nous serons bien entre nous ! Mais ça, vous n’osez pas l’écrire…

– l’étude sur le profil des bénéficiaires : bien entendu, vous avez raison quand vous affirmez, je cite : « il est important d’avoir une vision précise des différents types de public à charge du CPAS, de la durée et du type d’aide octroyée, des procédures en vigueur afin d’avoir des objectifs précis à long terme et de prendre des mesures plus concrètes ». Mais vous avouerez tout de même que quand on a dit ça, on n’est encore nulle part…

Par contre, je suis choqué de lire, au sous-titre « concrètement » : « déterminer les différentes catégories de bénéficiaires afin de pouvoir se concentrer en priorité sur les personnes les plus à même de réintégrer le monde socio-professionnel ».

D’abord, ces personnes peuvent être prises en charge par des organismes beaucoup mieux outillés que le CPAS pour ce faire, je pense notamment au Forem.

Mais surtout, cela reviendrait à créer une catégorisation, une différenciation entre d’une part les personnes qu’on peut espérer réinjecter dans le système et d’autre part, celles pour lesquelles il n’y a plus aucun espoir, et à qui on n’accorderait donc qu’une attention toute résiduelle !

Il me semble qu’au contraire, c’est le rôle et, oserais-je dire l’honneur, du CPAS de se consacrer prioritairement aux personnes qui sont dans les plus grandes difficultés.

Ce sont bien ces personnes, les plus fragiles, qui n’ont plus que le CPAS comme ultime bouée de sauvetage, et c’est bien vers elles que nous devons diriger notre attention et concentrer nos efforts.

Voilà donc pour cette note de politique générale, bizarrement sous-titrée « Nos défis pour 2013 ». Si ce sont là, vraiment, les défis que vous vous assignez, on ne peut pas dire que vous placez la barre bien haut !

De manière générale, nous avons là un budget et une politique qui ne me semblent pas traduire les préoccupations qui doivent être les nôtres

– pour ce qui est l’intégration

– pour ce qui est l’émancipation sociale

– pour ce qui est la prise en compte des difficultés vécues par une population victime d’un système qui fait les riches toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres.

L’ascenseur social est en panne depuis longtemps, sauf dans le sens de la descente, et ce n’est pas un budget comme celui-ci, évidemment, qui va lui permettre de fonctionner à nouveau.

Par conséquent, vous comprendrez que je voterai contre ce budget.

Je vous remercie pour votre attention.

Paul Fauconnier. Conseiller Ecolo au CPAS de Verviers